Bybit a figuré pendant plusieurs mois sur la liste noire de l’Autorité des marchés financiers, tout en continuant d’attirer des utilisateurs français. L’inscription de la plateforme auprès du régulateur français en mai 2024 a mis fin à cette situation ambiguë.
La conformité réglementaire n’efface pas pour autant les risques liés au trading de crypto-actifs, souvent signalés par les autorités. L’évolution du statut légal de Bybit en France soulève des questions sur la protection des investisseurs et les garanties effectives offertes par ce type de plateforme.
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Bybit en France : retour sur une plateforme controversée
Née en mars 2018 sous l’impulsion de Ben Zhou et basée à Dubaï, Bybit n’a pas tardé à se hisser parmi les géants du trading de cryptomonnaies. Avec plus de 20 millions d’inscrits à travers 160 pays, la plateforme ne fait pas dans la demi-mesure : chaque jour, son volume d’échange dépasse les 10 milliards de dollars. Bybit multiplie les possibilités, du spot trading aux produits dérivés en passant par les NFT, l’épargne crypto, le staking, le launchpad, les solutions automatisées ou encore le prêt d’actifs numériques.
La France, cependant, a opposé une résistance particulière. En mai 2022, Bybit se retrouve sur la liste noire de l’AMF, faute d’enregistrement en tant que PSAN. L’étau se resserre : sous pression, la plateforme annonce l’arrêt de ses services à l’été 2024. L’épilogue tombe le 8 janvier 2025, date de la fermeture définitive des activités françaises de Bybit.
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À ce moment, les clients français font face à une situation inédite : leurs avoirs, d’abord convertis en USDC, migrent vers Coinhouse, une entreprise mandatée pour gérer le rapatriement des fonds. Coinhouse facture alors des frais de garde, décision qui suscite perplexité et colère chez certains. L’épisode met en lumière la fermeté de la régulation en France : les plateformes crypto évoluent désormais sous surveillance, et l’improvisation n’a plus sa place.
Quelles obligations réglementaires pour les exchanges de crypto-actifs ?
En France, la réglementation des plateformes d’échange s’articule autour d’un impératif : protéger les investisseurs et instaurer de la transparence. L’Autorité des marchés financiers (AMF) exige de toute société opérant en France, qu’elle soit d’ici ou d’ailleurs, qu’elle décroche le sésame du prestataire de services sur actifs numériques (PSAN). Sans ce statut, impossible d’acheter, vendre ou conserver légalement des cryptomonnaies sur le territoire.
L’Union européenne a récemment renforcé la surveillance avec la législation MiCA (Markets in Crypto-Assets). Cette licence unique, désormais incontournable pour accéder à l’Espace économique européen (hors Malte), devient la clé d’entrée pour les exchanges voulant s’installer durablement en Europe. Bybit a obtenu la MiCA en Autriche auprès de la FMA le 28 mai 2025, ce qui lui permet d’envisager un retour légitime sur le continent. La plateforme ne s’arrête pas là : elle dispose aussi d’autorisations au Kazakhstan (AFSA), à Chypre, en Géorgie (via la Banque nationale) et à Dubaï (VARA).
Pour comprendre ce qui est attendu des exchanges, voici les obligations concrètes qui s’imposent aux acteurs du secteur :
- Mise en place de dispositifs stricts pour lutter contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme (KYC/AML) ;
- Protection des fonds des clients, avec séparation claire des actifs ;
- Affichage transparent des frais et des modalités de trading ;
- Communication exhaustive sur les risques associés aux actifs numériques ;
- Coopération avec les autorités de contrôle et de régulation.
Le secteur bouge vite : pour rester en conformité, les plateformes doivent anticiper et adapter leurs procédures. Ni l’AMF ni la réglementation MiCA ne laissent place à l’improvisation, et les acteurs qui veulent compter sur le marché européen n’ont plus le droit à l’erreur.
Plateformes sur liste noire : quels risques pour les utilisateurs français ?
Apparaître sur la liste noire de l’AMF n’a rien d’anodin. Cela signale une absence d’enregistrement PSAN et donc un contournement des règles françaises sur les actifs numériques. Conséquence : suspension des activités, gel des dépôts et retraits, incertitude sur la récupération des fonds.
Lorsque Bybit a suspendu puis stoppé ses services en France entre août 2024 et janvier 2025, nombre d’utilisateurs ont vu leurs actifs transférés chez Coinhouse, convertis en USDC et soumis à des frais de garde. Beaucoup ont vécu ce processus comme une obligation subie, sans réelle visibilité ni explication sur les conditions. Quitter le marché ne se fait jamais sans heurts pour les investisseurs : la sécurité des avoirs et la continuité des opérations peuvent voler en éclats.
Le risque de perdre l’accès à ses actifs demeure la menace la plus concrète. Impossible de vendre ou de retirer au moment voulu, apparition de frais imprévus, dépendance à une tierce partie pour la restitution des fonds : autant de situations qui érodent la confiance envers les plateformes non régulées. L’encadrement par l’AMF ne se limite pas à poser un cadre : il vise aussi à protéger les particuliers contre les dérives et les décisions unilatérales.
Un sentiment de liberté totale peut vite se retourner contre l’utilisateur sur le marché crypto : sans cadre, le risque d’arbitraire grandit, et les recours sont rares en cas de litige. Rester vigilant, c’est protéger son portefeuille.
Comment sécuriser ses investissements face aux dangers du trading non régulé
À première vue, le trading non régulé fascine par l’abondance d’options : Bitcoin, Ethereum, NFT, produits dérivés, staking, épargne, robots de trading, levier. Mais derrière ce foisonnement, la réalité impose la prudence. Hors des radars de l’AMF, le risque se gère seul. Bybit, OKX, Bitget rivalisent d’ingéniosité, mais la sécurité du capital ne dépend que de l’utilisateur.
Pour limiter l’exposition aux mauvaises surprises, il devient nécessaire de répartir les risques. Voici comment procéder de façon concrète :
- Évitez de concentrer vos actifs sur une seule plateforme, aussi séduisante soit-elle.
- Favorisez les exchanges enregistrés PSAN ou conformes MiCA, comme Coinbase ou Kraken, qui offrent un filet de sécurité contre les interruptions ou pertes non anticipées.
- Retirez régulièrement vos fonds vers un wallet personnel, surtout si la plateforme ne dispose pas de licence européenne : l’autodétention reste un rempart efficace pour Bitcoin, Ethereum ou les stablecoins.
Autres réflexes à adopter pour protéger son portefeuille :
- Examinez la fiabilité de la plateforme : volume d’échange, réputation, qualité du support client, conformité réglementaire.
- L’effet de levier, sans expérience, peut transformer une correction de marché en déroute financière.
- Prenez le temps d’identifier les frais cachés : garde, conversion, retrait, autant de coûts qui grignotent la performance.
D’autres outils, comme le dollar cost averaging, permettent d’entrer progressivement sur le marché, de limiter la volatilité et d’éviter de miser sur un seul instant d’achat. Considérez l’investissement crypto non pas comme une course effrénée, mais comme un marathon où la patience et la méthode font la différence. Les marchés récompensent rarement la précipitation ; la prudence, elle, finit toujours par payer.